The Fault in Our Stars

À bien des égards, Augustus interprète sa propre existence. C’est pourquoi il existe deux versions de son personnage dans le roman. La première version que nous rencontrons est la façade appelée Augustus Waters. Nommé, de manière assez grandiose, d’après le premier empereur romain, Augustus joue le rôle d’un garçon fort, confiant, drôle et charmant. Il fétichise continuellement sa propre grandiosité. Il est convaincu que l’importance de la vie est d’être héroïque, de laisser un noble héritage, d’avoir un impact monumental sur l’humanité. Cette version d’Auguste tâtonne sur des monologues calculés dans le parc. Il planifie à l’excès des pique-niques à thème hollandais, dans les moindres détails, pour un effet purement scénique. Il se laisse berner par des métaphores voyantes de sa propre construction, comme lorsqu’il se sacrifie dans un jeu vidéo en sautant sur une grenade afin de sauver des enfants.

Lorsque son cancer revient, cependant, toute cette performance tombe. Ce qui reste, c’est Gus, un adolescent d’Indianapolis qui était un athlète vedette et qui se trouve maintenant en train de mourir d’un cancer. Gus est le garçon que ses parents ont toujours vu. En fait, Hazel apprend que son surnom est « Gus » uniquement parce que c’est ainsi que ses parents l’appellent. Mais Hazel ne l’aime pas moins parce qu’il est Gus. Bien au contraire : Elle ne commence à l’appeler Gus plutôt qu’Auguste qu’une fois qu’ils se sont familiarisés intimement l’un avec l’autre, une fois qu’Hazel connaît toutes les facettes de son personnage et pas seulement la version performée qu’elle rencontre pour la première fois. Elle voit que, sous les gestes romantiques et la grandiloquence théâtrale, Gus est un jeune homme de dix-sept ans doux, attentionné et naturellement terrifié. De plus, c’est son amour pour Hazel Grace qui apprend à Augustus qu’il peut être Gus. Alors qu’il se détériore physiquement, il est contraint de se rendre compte qu’il va mourir sans avoir fait quoi que ce soit d’extraordinaire pour l’humanité, et une transition spirituelle plus profonde s’opère. Grâce à Hazel, il réalise qu’échouer à faire quelque chose d’extraordinaire n’équivaut pas à être insignifiant.

Au cours du roman, le véritable Gus se révèle à travers le geste le plus emblématique de son homologue augustinien : l’acte de placer une cigarette dans sa bouche. La métaphore de la cigarette sert de lien qui unit les deux identités disparates. En effet, la cigarette révèle le contraire de ce qu’elle est censée projeter : Auguste veut que la cigarette représente le contrôle qu’il exerce sur ce qui pourrait le tuer, mais il s’agit en fait d’un instrument sur lequel il s’appuie lorsqu’il se sent le plus vulnérable, le plus semblable à Gus. Il se saisit de la cigarette dans les moments d’incertitude, comme lorsqu’il rencontre Hazel pour la première fois ou à bord de l’avion, lorsqu’il a peur de voler.

Peter Van Houten : Dans un roman quelque peu structuré autour de la métafiction, Une Affliction impériale jouant un rôle de premier plan dans la fiction que nous lisons, Van Houten en est le plus vif représentant. En tant que tel, il révèle le pouvoir magique de la fiction tout en démystifiant le romantisme attribué à la paternité. Pendant la majeure partie du roman, Hazel considère Van Houten comme un véritable dieu ou, à tout le moins, comme un puissant prophète. An Imperial Affliction est la bible personnelle d’Hazel. Le roman lui parle de la maladie terminale d’une manière qu’aucun autre média, personne ou groupe de soutien ne pourra jamais faire. L’acte de lire le roman de Van Houten est si incroyablement personnel pour Hazel qu’elle associe par erreur la magie du roman à la grandeur de son auteur. Cependant, lorsque Hazel rencontre Van Houten pour la première fois, le sentiment de magie se dégonfle. Elle le voit comme l’ivrogne négligent et souvent méchant qu’il est vraiment. Elle apprend qu’un auteur n’est rien de plus qu’un être humain, avec des qualités et des problèmes humains.

Van Houten porte de nombreux masques tout au long du roman. L’un de ses rôles les plus cruciaux est de dépeindre la variété des façons dont les gens gèrent la douleur. Lorsque nous apprenons qu’Une affliction impériale est en réalité un récit fictif de la vie de la fille de Van Houten, Anna, qui est morte d’un cancer à un jeune âge, nous sommes en mesure de voir l’auteur avec plus de sympathie. Dans son roman, il est la version tragique de la vie réelle de la mère fictive d’Anna. Il devient l’incarnation vivante de la plus grande peur d’Hazel : que ses parents soient si bouleversés par sa mort qu’ils ne puissent plus continuer.